Dépêches JurisClasseur - Actualités - Vendredi 27 Mai 2016
Réforme de la justice prud’homale : une nouvelle étape est franchie
Adaptation de la procédure prud'homale en premier ressort et en appel ; regroupement devant le tribunal d'instance du contentieux préélectoral de l'entreprise ; saisine de la Cour de cassation pour avis pour l'interprétation des conventions et des accords collectifs.Pris en application de la loi Macron(L. n° 2015-990, 6 août 2015, art. 258, 259 et 267 : JCP S 2015, 1324, étude par T. Lahalle), le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail« adopte les mesures nécessaires à la modernisation de la justice prud'homale et à la rationalisation du traitement de certains contentieux du travail relevant de la compétence judiciaire », selon sa notice explicative. Il procède pour cela à « une réforme d'ampleur des différentes étapes de la procédure prud'homale, afin d'en améliorer les délais de traitement », précise pour sa part le compte rendu du conseil des ministres du 25 mai 2016 au cours duquel le garde des Sceaux, la ministre du Travail et le ministre de l'Économie ont présenté une communication relative à la mise en œuvre de la réforme des prud'hommes. L'occasion pour les membres de l'exécutif de faire un certain nombre d'annonces.
• Procédure prud'homale revue et corrigée. - En premier lieu et pour l'essentiel, le décret du 20 mai 2016 modifie le livre IV de la première partie du Code du travail, ainsi que certaines dispositions du Code de procédure civile, afin d'inscrire la juridiction prud'homale « dans un cadre processuel rénové » :
- « la compétence naturelle du conseil de prud'hommes est respectée », tant dans son rôle de conciliation des parties que dans celui d'homologation des accords résultant d'autres modes amiables de résolution des différends. Précisément, sont renforcées les missions du bureau de conciliation, devenu bureau de conciliation et d'orientation, qui se voit conférer la capacité d'homologuer des accords issus de règlements amiables des différends, la mission d'orientation des affaires devant la formation de jugement appropriée en cas d'échec de la conciliation, ainsi qu'un rôle accru dans la mise en état du dossier grâce à la possibilité de sanctionner les défauts de diligence des parties afin d'accélérer le traitement des procédures.
Par ailleurs, le décret du 20 mai 2016 entérine la création de nouvelles formations de jugement adaptées aux différentes situations afin d'améliorer les délais de traitement : le bureau de jugement pourra être composé soit de quatre conseillers prud'hommes, soit d'une formation restreinte de deux conseillers qui devra statuer dans un délai de trois mois, soit enfin de la formation de départage, composée de quatre conseillers et d'un juge du tribunal de grande instance, qui pourra désormais être saisie directement à la demande des parties et non plus seulement lorsque les autres formations n'auront pas réussi à s'entendre ;
- « l'oralité de la procédure prud'homale est réaffirmée, dans une acception qui systématise la mise en état des dossiers, en vue d'accélérer le traitement des procédures » ;
- par application du droit commun du procès, les règles spécifiques de l'unicité et de la péremption d'instance sont supprimées ;
- l'appel sera régi par la procédure avec représentation obligatoire, les parties étant ainsi tenues devant la juridiction de second degré de recourir à un avocat ou à un défenseur syndical.
• Regroupement du contentieux préélectoral. - Le livre III de la deuxième partie du Code du travail est également modifié, afin de définir la procédure suivie devant le tribunal d'instance, juge du contentieux des élections dans l'entreprise, lorsque celui-ci connaît d'un recours formé à l'encontre d'une décision de l'autorité administrative en matière préélectorale.
• Interprétation des textes conventionnels. - Sont enfin précisées les conditions dans lesquelles les juridictions judiciaires pourront saisir pour avis la Cour de cassation en interprétation de conventions et d'accords collectifs.
• Entrée en vigueur. - Le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 est entré en vigueur, pour l'essentiel de ses dispositions, au lendemain de sa publication au Journal officiel, soit le 26 mai 2016. Certaines modifications introduites, affectant la procédure prud'homale ne s'appliqueront toutefois qu'à compter du 1er août 2016.
• À retenir également. - Le conseil des ministres du 25 mai 2016 aura été l'occasion d'en apprendre davantage sur les prochaines étapes de la réforme d'ensemble de la justice prud'homale initiée dans le cadre de la loi Macron. Notamment, un référentiel indicatif du montant des indemnités de licenciement dues en cas de licenciement sans cause réelle ni sérieuse sera présenté avant l'été aux organisations syndicales. Ce référentiel « est un outil qui permettra une meilleure prévisibilité des décisions pour les entreprises et pour les salariés, en évitant de créer des disparités importantes d'un conseil de prud'hommes à l'autre, sans rien enlever au droit des salariés à une réparation intégrale de leur préjudice en cas de licenciement abusif. Cette prévisibilité favorisera également la conciliation, ainsi que l'acceptation des décisions rendues, permettant ainsi de réduire le taux d'appel et plus globalement les délais de traitement des décisions », ont expliqué les ministres. Construit à partir d'une étude des décisions des juridictions sur le montant des indemnités accordées, un projet de référentiel sera présenté dans les semaines qui viennent aux partenaires sociaux. Il sera fonction de l'ancienneté des salariés, mais permettra également de prendre en compte leur situation individuelle en fonction de leur âge et de leur capacité à retrouver un emploi.
JCl. Travail Traité, synthèse 200
Sources : : D. n° 2016-660, 20 mai 2016 JO 25 mai 2016, Textes 30 Conseil des ministres, 25 mai 2016, compte-rendu